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Docteur
François Goldwasser

Oncologue & Chef du Pôle Cancérologie de Cochin,
Professeur à la Faculté de Médecine Paris Descartes (75)

Pourquoi avez-vous fait médecine, puis oncologie pour être là où vous êtes ?

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J’ai voulu faire médecine pour être cancérologue. Je trouvais que le cancérologue était confronté aux vraies questions de la vie et c’était ainsi le champ naturel de l’aide à autrui que j’ai souhaité. Je ne pouvais pas envisager d’utiliser un savoir-faire pour de la "bobologie". Une autre explication, plus psychanalytique, est qu’étant petit-fils d’une famille morte en camp de concentration, j’avais sans doute à cœur de rétablir et développer l’humanisme et contre-balancer les horreurs dont est capable l’humanité. Je n’étais pas conscient de ce "moteur" en m’inscrivant en médecine mais il est "puissant" et rend compte de l’exigence éthique du service.

 

Vous avez créé le service cancérologie de l’hôpital Cochin en 2001 ? 

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L’hôpital Cochin prenant la mesure de l’importance de sa patientèle en cancérologie, sans avoir de service de cancérologie décida de faire un appel à candidatures pour un poste de professeur en cancérologie pour créer un service de cancérologie. Je fus choisi et devins donc à 35 ans professeur en médecine et chef du service de cancérologie à créer en 2001. Celui-ci fût d’abord un hôpital de jour, puis eut 6 lits d’hospitalisation complète et désormais 3 étages dont 27 lits d’hospitalisation complète. Désormais, c’est un des plus gros services de cancérologie : 2 professeurs en médecine, 5 praticiens hospitaliers, 4 chefs de clinique, 7 internes et l'une des plus grosses files actives de patients (un peu plus de 6000).

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Vous êtes médecin, scientifique, que pensez-vous des médecines complémentaires ?
 
La médecine occidentale a détruit 2000 ans de savoir-faire et de connaissances transmises surtout oralement et souvent par des femmes. La chasse aux sorcières a conduit à une grande perte de connaissance. Descartes et l’esprit cartésien ont coupé le corps et l’esprit pour être objectif. Ceci pouvait avoir un sens pour développer des connaissances à rebours des croyances et des certitudes de l’Eglise mais, c’est catastrophique pour comprendre ce qu’est un être humain. Plusieurs sciences apportent maintenant des données fiables pour "casser" cette barrière corps-esprit mais elles demeurent isolées et doivent converger : neurosciences +++, immunologie, micro-biote, ramènent à un rôle de "cerveau" du corps totalement négligé.

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Nous avons échangé au sujet du décodage biologique, qu’en pensez-vous ? 

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En ce qui concerne le décodage biologique, j’aimerais pouvoir mener une recherche clinique visant à valider scientifiquement cette approche qui pour le moment est intéressante et même captivante mais empirique et donc nécessairement sujette à caution. Il faut impérativement que l’interlocuteur "décodeur" soit très juste et très humble. Cela suppose une très grande compétence en psychologie préalablement couplée avec d’autres approches permettant d’ouvrir l’esprit. Seuls quelques patients très ouverts d’esprit ou très intuitifs peuvent être invités dans cette direction.

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Auriez-vous des réserves à l’égard des médecines complémentaires ?

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Il existe un commerce sauvage de l’espoir et du désespoir, en particulier via internet. Le charlatanisme emprunte toujours aux techniques séduisantes du moment. Quelques repères pour s’éloigner : la discordance entre un traitement "révolutionnaire" mais bizarrement

confidentiel et sans donnée validée, le coût qui renseigne sur la motivation, et enfin l’ego du médecin génial immodeste et isolé. Je n’ai donc pas une attitude systématique et la qualité des intervenants et l’éthique de leur démarche est très variable. En ce qui concerne la proposition de médecines "douces", je dirais donc que je suis ouvert mais pas les yeux fermés et il faut d’autre part partir du patient et de ses propres représentations et préjugés.

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Quelles seraient vos recommandations en termes de médecines complémentaires ?

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Assurément, je conseille de considérer autre chose que l’aide du médecin et du médicament et d’investir d’autres champs (activité physique, méditation ou relaxation…). 
 
Enfin dernier piège, les apports oraux de produits naturels divers et variés exposent à des interactions notables avec les médicaments anti-tumoraux. Il est donc essentiel d’en parler avec le médecin plutôt que le dissimuler et d’étudier au cas par cas la compatibilité.

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Lorsque vous découvrez un dossier médical, un nouveau patient, que ressentez-vous ? 

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Cela tient en une phrase : Comment aider ? Une première dimension est purement technique et sollicite l’expertise médicale technique sur la maladie et les traitements. Une autre dimension est humaine et se juge au fait que le patient se sent mieux après la consultation, retrouve le sourire, a davantage de sérénité bref, vit mieux l’épreuve que sans le passage en consultation.

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Quels sont les conseils que vous aimeriez donner à toutes les personnes qui viennent d’être choquées par l’annonce d’un diagnostic ? 

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Il n’y a pas de règle systématique, chacun est différent selon son parcours passé mais aussi le contexte de son présent. Le choc, bombe atomique de l’annonce, est pour une large part lié au refoulement généralement complet de notre fragilité et de notre destin d’être vivant TRANSITOIRE donc, de notre finitude. L’idéal est préventif, c’est d’intégrer cette réalité tous

les jours quand nous allons bien.
 
La première étape est donc de s’efforcer de prendre du recul, de rester totalement libre et autonome, maître de soi. Il faut prendre le temps de s’interroger sur le sens à donner -point sur lequel les médecins généralement n’aident pas- car, il est raisonnable de ne pas considérer que c’est seulement le hasard et la faute à l’absence de chance. Il est très important aussi d’être attentif à ses émotions et de prendre acte de sa vulnérabilité.
 
Il est très important face à l’épreuve d’identifier les ressources les plus efficaces pour soi : sport, relaxation, méditation, vie sociale, jardin ? et de ne pas tout attendre des médecins et encore moins des médicaments. Très important d’avoir avec soi une ou plusieurs personnes qui seront de vrais confidents, soutiens, amis, de vrais accompagnants auprès de qui on peut faire part de ce que l’on vit sans retenue. Les patients disent souvent qu’à cette occasion, ils ont pu savoir qui sont leurs vrais amis...
 
Enfin, il est très important de préserver la qualité de la communication entre patient et entourage, ce qui suppose que l’information factuelle puisse circuler et qu’ils disposent des mêmes informations. Il est désastreux pour la vie de famille qu’une personne ait la notion que la maladie est incurable, tandis que l’autre fait tout pour guérir...


Avez-vous vu des miracles improbables au cours de votre carrière, des cas désespérés en rémission?  
 
Je ne suis pas convaincu que l’espoir soit un très bon moteur même si, incontestablement certaines personnes dépriment et ont besoin d’être encouragées. L’espoir est très toxique en raison de son corollaire obligatoire qui est l’angoisse qu’il ne soit pas satisfait. Certaines personnes ont tout leur temps accaparé par ce couple espoir/angoisse et ne vivent plus. Par la suite, cela peut prendre la forme d’une angoisse de la rechute conduisant à ne pas vivre non plus sans maladie visible. Je préfère donc à l’espoir la notion de confiance dans la vie. Elle incite à considérer uniquement le présent. En considérant que tout ce qui doit être fait est entrepris. D’où l’enjeu essentiel d’être en confiance avec l’équipe médicale et soignante et donc de s’assurer que l’on est bien soigné au bon endroit pour soi. Dès lors, arrivera ce qui arrivera, au mieux du possible et il n’y a donc aucune raison d’anticiper mentalement.
 
Néanmoins, pour répondre à la question, oui, nous récupérons parfois des situations in extremis. Le père d’une patiente qui a passé deux mois en réanimation et est désormais en pleine forme en rémission, me parlait au quotidien d’ascenseur émotionnel pour décrire les hauts et les bas au gré des améliorations et aggravations.
 
Professeur Goldwasser, quel est votre parcours professionnel ?

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J’ai été reçu au concours en première année de médecine à 17 ans puis au concours de l’internat de Paris à 23 ans. Je me suis spécialisé en cancérologie comme prévu. 5 années d’internat, allongées pour faire un doctorat en sciences aux Etats-Unis à l’institut national de recherche contre le cancer (NCI), au sein des instituts nationaux de la santé (NIH), à Bethesda, Maryland, USA. J’y suis resté 2 années pleines, puis je suis devenu chef de clinique à Villejuif. 

Docteur Patrick Bouffette
Oncologue & Hématologue Hôpital Américain
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