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Docteur
Patrick Bouffette

Oncologue & Hématologue
Hôpital Américain (92)

Un cancérologue a pour première mission de révéler une mauvaise nouvelle à quelqu’un qui

n’a aucune envie de l’entendre.

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Quelle est la mission de l’oncologue selon vous ?

 

Si le thérapeute est souvent imposé, choisir son oncologue, son thérapeute, son hématologue est essentiel. Il est essentiel de se sentir en confiance avec la personne qui va sinon vous amener à la guérison, au moins vous apporter une qualité de vie. Pour ma part, lorsque j’explique le programme thérapeutique du patient qui est en face de moi, j’ai besoin de le sentir adhérer à ce que je lui propose. Si j’ai de nombreuses demandes d’explications, de l’opposition au traitement, telles que : je ne veux pas de chimio, je ne veux pas d’opération…, alors je me dois d’être ferme avec la personne, et rappeler que je ne suis pas là pour lui faire plaisir, mais pour exercer mon métier et soigner. « Soit vous acceptez les solutions que je vous propose, soit vous ne les acceptez pas. Si vous ne les acceptez pas, je vous rends votre dossier, et je vous invite à consulter quelqu’un d’autre ». Cela arrive trois ou quatre fois dans l’année. Car il y a des malades récalcitrants à tout ce que l’on peut leur proposer. Surtout ceux qui se sont négligés.

 

Qu’entendez-vous par « négligé » ?

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C’est une patiente qui sait qu’elle a une tumeur au sein, par exemple, mais qui pendant plusieurs années, n’en a pas parlé, a refusé de faire les examens et notamment, la mammographie car elle savait que l’on trouverait quelque chose… C’est la même patiente qui exigera la guérison sans qu’on la touche. Comme je le dis, au moins une dizaine de fois dans l’année, j’ai eu le temps de faire deux spécialités dans ma vie : oncologie et hématologie, mais je n’ai pas pu faire psychiatrie. Autant j’essaie de développer des relations très empathiques avec les patients car j’ai une passion pour l’être humain, autant je ne peux pas aller au-delà.

 

Que recommandez-vous au patient qui sort abasourdi de votre cabinet après s’être pris

la claque ?

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D’abord, il ne rentre pas chez lui en ayant la sensation de s’être pris une claque mais en ayant la sensation que son cancer, il va le combattre plutôt que le subir. Son cancer n’est pas une punition, cela vient de lui être révélé et le mot cancer sera régulièrement utilisé. Lorsque les gens rentrent chez eux avec une idée très claire du traitement, le plus souvent, ils adhèrent au projet. Ils ont le droit de poser toutes les questions. Je leur dis toujours, «  si vous avez des questions, téléphonez-moi ». L’accès au téléphone est rarissime dans les hôpitaux publics malheureusement, car le service public n’est pas organisé pour, mais comme je suis dans le privé, tous mes patients ont mon numéro de portable.

 

Très rapidement, on crée une sorte de famille thérapeutique et les patients sont libres de contacter l’un ou l’autre médecin (radiothérapeute, chirurgien, oncologue…). Une fois que l’on se sent bien avec la personne qui nous prend en charge, l’avenir ne peut être que positif. Je dis toujours, « comment voulez-vous que je prescrive un traitement si je n’y crois pas ? Si je le prescris, c’est que j’y crois. Donc vous allez y croire avec moi et on verra après, jusqu’à preuve du contraire. »

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Nous répondons chaque jour à la question très simple : « comment aimerais-je que l’on s’occupe de moi si j’avais le problème de ce monsieur ou de cette dame ? » ; cela s’appelle de l’empathie. C’est très simple, être oncologue n’est pas que de la science, c’est être humain.

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Quels conseils donneriez-vous à une personne qui tombe malade ?

 

« Devant l’incertitude, pourquoi ne pas choisir l’espoir », « Demain se prépare aujourd’hui ».

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  • Bien se sentir avec son cancérologue. On ne peut pas parvenir à une guérison si on ne sent pas bien le traitement ou la personne qui prescrit le traitement.

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  • Rester informé. Avec moi, tous les malades ont 100 % de leur dossier avec eux. Radios, scanner, IRM, comptes rendus opératoires… Quand vous êtes chez vous, si vous avez des questions, appelez ? Et si vous voulez vous informer : ATTENTION à internet !

 

  • Vivez un peu de tout et beaucoup de rien ou faites-vous plaisir. Alcool : un peu de tout, beaucoup de rien Sucre : Un peu, dans la pâtisserie de temps en temps

 

  • On mange bien. Si cela ne tenait qu’à moi, les ¾ des rayons de supermarchés seraient détruits tant les aliments qu’on y trouve n’apportent rien à la santé ou la détruise. PAS DE PRODUITS INDUSTRIELS.

 

  • On bouge son corps, on met ou remet la machine en route
     

  • On arrête la cigarette
     

  • Tentez les groupes de paroles, ils apaisent le stress

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Quel rôle ont les médecines complémentaires sur la guérison ?

 

Elles viennent en complément mais pas en remplacement du traitement. On parle de sophrologie, d’acupuncture d’homéopathie… Toutes améliorent le bien-être. Et tout ce qui améliore le bien-être contribue à la guérison. Rappelez-vous, le patient n’est pas un dossier, c’est un humain. On ne proposera pas les mêmes choses à deux personnes différentes qui auraient le même diagnostic. Le patient est le point central de la relation avec le médecin. Il doit avoir envie de se soigner et être assuré que le traitement que l’on met en place est la meilleure solution pour lui, en fonction de nos connaissances scientifiques actuelles. J’aime à dire : « vous bénéficiez du traitement, vous ne le subissez pas ». Techniquement, en tant que médecin, nous nous devons de vous proposer ce qui répond le mieux à votre problème. Nous gérons le présent. Mieux nous gèrerons le présent, mieux le futur peut s’envisager. Comme dit le proverbe arabe « si tu ne sais pas où tu vas, tu ne peux pas y arriver ». Notre enjeu, sans promettre la guérison, est d’arrêter la progression de la maladie. Car en cas de récidive, dans un, trois ou dix ans, il y aura de nouveaux traitements. Ainsi, l’immunothérapie, qui n’existait pas il y a dix ans, révolutionne le traitement du cancer. De plus en plus, j’accueille des malades qui viennent depuis longtemps, parfois même depuis trente ans. Ce sont des personnes qui vivent avec la maladie, des personnes chez qui la maladie a été stoppée, qui à chaque étape ont accepté le programme thérapeutique, qui ont des cellules qui ont bien voulu répondre au traitement, et qui sont là pour témoigner que l’on peut continuer à vivre,  que l’on peut avoir une vie fabuleuse, même si l’on est malade depuis 25 ans.  

Docteur Véronique Minard
Pédiatre & Oncologue
Institut Gustave Roussy
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