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Marie Fugain
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Docteur
Cloé Brami

Oncologue & professeur de Minfdulness
aux étudiants en médecine à la Faculté de Paris Descartes.

Cloé, qui êtes-vous, pourquoi avez-vous choisi de devenir oncologue ?

C’est toujours intéressant de prendre le temps de répondre à cette question, qui êtes-vous ? Aujourd’hui, je dirai que je suis une femme - avec tout ce que la féminité inclut : mère, médecin, chercheur et entrepreneur. Je médite depuis l’adolescence, j’ai pu explorer plusieurs outils de

«mind and body» en cancérologie aux Etats-Unis dans un service de médecine intégrative. La méditation m’est parue tellement complémentaire au traitement que j’ai eu envie de transmettre cet outil dans le soin en me donnant à la méditation de pleine conscience selon le programme MBSR (mindfulness Based-stress reduction) via l’ADM (association pour le développement de la mindfulness).

L’oncologie est une spécialité qui allie le corps, l'esprit et l'interdisciplinarité. Je voulais être psychiatre et puis le cancer est apparu dans ma vie familiale me faisant m'interroger sur cette maladie. En effet, j’étais jeune étudiante lorsque ma mère a été atteinte d’un cancer pulmonaire - aujourd’hui guéri - mais cet événement a inévitablement participé à mes choix. Puis, j'ai eu la chance de recevoir un enseignement de la cancérologie en Faculté de médecine, à Paris Descartes, très global et orienté sur l'humain ce qui m'a convaincu. En revanche, j’ai toujours su que je voulais créer des ponts entre la médecine occidentale et les sciences plus contemplatives. Cela fait 10 ans que je travaille en oncologie dans des structures publiques ou privées, je profite d’être en thèse de sciences pour réfléchir à la façon dont je peux exercer une oncologie intégrative. C’est une question de timing. Mais je proposerai pour janvier 2020 un premier programme de méditation pour patients, aidants et soignants touchés par le cancer à Paris.

Qu’entendez-vous par oncologie intégrative ?

 

L'oncologie intégrative est la combinaison des traitements systémiques de référence (chimiothérapie, radiothérapie, chirurgie, immunothérapie...) aux traitements dit complémentaires (méditation, yoga, activité physique, alimentation adaptée, médecines ancestrales traditionnelles…) dans le but de retrouver sa santé. En effet notre corps physique n’est pas dissocié de notre esprit et de son environnement. L’oncologie intégrative ou plus largement la médecine intégrative est donc la possibilité de soigner en intégrant toutes ces dimensions et de redonner à l’être humain la possibilité d’être acteur. Cette complémentarité est au-delà de l’amélioration de la qualité de vie (j’ai du mal avec ce terme:). J’ai récemment discuté du sujet avec un professeur d’oncologie, le Pr Goldwasser, et nous avons conclu qu’il était temps de faire de la cancérologie de l’individu (de l’hôte) plutôt que de la cancérologie de la maladie. L’essor de l’immunologie en cancérologie est une ressource fondamentale dans ce changement de paradigme. L’oncologie intégrative est une prise en charge a intégrée précocement en prévention, et autant que possible au moins au diagnostic sans attendre les situations palliatives. C’est pour cela que l’alliance avec l’oncologue est primordiale.

Qu’apporte l’oncologie intégrative au patient, au soignant, à l’aidant ?
 

Il faut voir cette prise en charge comme la possibilité de mobiliser les ressources psychiques et physiques de chacun pour tolérer, accepter les traitements et récupérer. Par exemple, combien de patients en cours de traitement ont un sommeil altéré ? Nous savons que des outils comme la méditation réduisent l’anxiété et améliorent la qualité du sommeil. En revanche, il ne s’agit pas de faire de l’alternatif. Et même si la France s’ouvre depuis Juin 2018 à la terminologie d’oncologie intégrative depuis que la société américaine de cancérologie (ASCO) a reconnu les bénéfices de  cette complémentarité, c’est aussi important de continuer d’être rigoureux, d’informer sur les interactions médicamenteuses entre chimiothérapies et les compléments alimentaires, de savoir lorsque la médecine occidentale est nécessaire… On voit beaucoup de cas extrêmes de négligences et de dénis en lien avec ces approches alternatives isolées. Cette vision du soin dépasse l’oncologie, et s’applique aux aidants et aux soignants. Ne sommes-nous pas tous en interaction?  Nous sommes encore loin de comprendre l’ampleur du lien entre le corps et le psychique, et tant mieux …

Lorsque vous accueillez un patient comment ressentez-vous d’annoncer d’un diagnostic difficile ? Comment accompagnez-vous la personne ?

Merci de poser cette question. Étonnement, le diagnostic est souvent annoncé par des confrères chirurgiens ou spécialistes qui nous adressent des patients.  Mais nous savons que la personne qui franchit la porte d’un oncologue vit une rupture de vie, un avant et après. Pour ma part le challenge est surtout lors des annonces de récidive. Je ne crois pas qu’il y ait un protocole tout fait.  Mais ce n’est jamais facile. Cependant j’ai compris qu’au-delà de la technique - qui est au moins la base à acquérir -  l’importance est de créer une relation de confiance et cela passe à 80% par la communication et la présence. Aujourd’hui, j’ai plus de maturité, et de réflexivité et je peux partager que j’essaie d’être authentique, parfois ça convient, parfois non.

Vous êtes enseignante en méditation à la faculté de médecine, qu’est-ce qui vous motive

à développer la méditation en médecine ?

Je suis très engagée dans l’enseignement et la transmission des savoirs autour des humanités en médecine. Depuis plusieurs années, j’ai pris conscience que la conception de la santé et du soin doit évoluer en France. Mais c’est surtout la souffrance hospitalière qui m’a faite passer à l’action, en ayant peur pour mes enfants et l’avenir du système de santé. L’enseignement est une façon de semer des graines. Et j’ai beaucoup de chance car le timing est propice à ces transformations. Les étudiants en médecine sont des adolescents curieux, intelligents et humains, c’est un cadeau d’avoir la possibilité d’apprendre avec eux. Ces programmes de méditation ont plusieurs objectifs: développer la curiosité, la réflexivité, réfléchir à la question du soin, et se rapprocher de leurs émotions.

Nous développons l’accompagnement auprès du personnel médical, qu’aimeriez-vous dire

à tous les médecins ?

L’hôpital est un lieu de souffrance en lien avec sa fonction mais aujourd’hui, les soignants souffrent. Il y a 10 ans l’ambiance étaient différente, les restrictions budgétaires ont réduit la fonction de soignant à celle de technicien et cela crée beaucoup d’insatisfaction et de frustration qui impactent la santé mentale. J’ai envie de dire aux soignants qu’on fait un métier fabuleux mais qu’on a aussi le droit de dire que les conditions de travail peuvent ne plus convenir à nos valeurs. Et surtout que tout évolue et se transforme, un jour ça peut être dur, un autre génial.

 

Quels conseils aimeriez-vous donner aux personnes malades ?

 Se faire confiance et s’écouter.

Docteur Peggy Fournier, Gastroentérologue
& Oncologue libérale
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